Quoi ?
Ce qui nous amène à nous lier profondément d’amitié avec quelqu’un est parfois indicible. Lorsque l’on connaît suffisamment une personne, ce qui nous liait à elle à l’origine, les raisons de notre rencontre, finissent par s’effacer. Ne reste alors que les deux âmes jointes. Au-delà de toute rationalité, ce sentiment peut apparaître de façon instantanée entre deux êtres et s’installer durablement.
Montaigne parle ici de son amitié légendaire avec La Boétie, qu’ils avaient prophétisé dès leur rencontre comme allant traverser les siècles ! Cette relation a été déterminante pour lui, leurs échanges intellectuels lui ayant permis d’aboutir à son œuvre majeure, les Essais (1580).
Cette citation rappelle le concept de philia qui, dès l’antiquité grecque, qualifiait les amours amicaux, la camaraderie. Cette forme d’amour était considérée comme supérieure à l’éros, l’amour sexuel, et la storgê, l’amour familial, car il apparaissait comme un amour raisonnable.
Pourquoi ?
Si les amitiés peuvent être si puissantes et déterminantes dans nos vies, c’est que le rapport à l’autre est aussi ce qui nous permet d’exister et d’approfondir notre propre connaissance de nous-mêmes. Dépourvues de déguisements dans leur relation à l’autre, les deux âmes peuvent ainsi se joindre pour ne former qu’un seul individu. Une amitié selon Montaigne est donc nécessairement exclusive, car on ne peut atteindre une telle intensité qu’avec une seule personne.
Montaigne distingue ces amitiés d’une haute intensité de ce qu’il qualifie “d’amitiés ordinaires et coutumières”, qu’on ne saurait comparer. Ici, le coup de foudre amical peut être tout aussi fulgurant qu’un coup de foudre amoureux. Cependant, s’il s’agit bien d’amour dans les deux cas, les deux types de relations demeurent bien distinctes. L’amitié est une forme « d’amour raisonné ».
Qui ?
Ces personnes qui se retrouvent par hasard sur notre chemin et qui, sans que nous ne l’ayons anticipé une seconde, ne nous quittent plus par la suite. La famille que nous choisissons pour nous accompagner au long de nos vies, nos frères et sœurs de cœur.
Comment ?
L’amitié est une union des volontés, une loyauté à toute épreuve, ce qui permet une confiance absolue en l’autre. Pour autant, elle ne se place pas au-dessus de la morale ! Il ne s’agit pas de s’abandonner entièrement, mais de continuer d’être conduit par la raison. Porter un regard éclairé sur son ami.e et ses actes nous permet de l’épauler de la meilleure façon possible.
Le respect, l’estime, la bienveillance, souhaiter le meilleur pour l’autre… Autant de sentiments nécessaires pour faire de cette amitié une relation saine et solide sur le long terme.
Ce qui donne…
Guidés par la raison, et par-delà les mystères qui entourent la force de nos liens, nous traversons l’existence main dans la main.