Une femme devant l'océan ouvre les bras en croix

Des Pauses pour (re)penser la Liberté – Coin lecture d’automne avec Sophie

Le mot « liberté » est à la fois le premier terme de la devise française et celui qui occupe le plus nos temps modernes. Entre liberté individuelle et liberté collective, entre libre-arbitre et déterminisme, le Sens de nos actions et leurs causes nous interrogent individuellement et collectivement.

La liberté ne semble jamais acquise dans l’absolu, elle est une quête permanente. Par la seule présence d’autrui, elle doit s’ajuster en permanence pour ne pas s’oublier et ne pas oublier l’autre, un véritable défi en soi. Certaines lectures peuvent faciliter le cheminement de pensées : entre ponts et chaussées glissantes, entre monts et vallées verdoyantes, entre soleil et trombes d’eau, le moins que l’on puisse dire, c’est que la liberté n’est jamais acquise, quel que soit le paysage qui s’offre à nous. Une anaphore est souvent utile pour une Ode !

 


 

Couverture du livre "Ils vivent le siècle" de Mélanie Loisel, montrant une mosaïque de visages représentant diverses époques et cultures.

Quand je pense à la liberté, je pense « révolution ».

Pour conquérir ou reconquérir une liberté, il faut parfois des révolutions. Dans Ils vivent le siècle (Ed. de l’Aube), Mélanie Loisel s’est entretenue avec une trentaine de personnes : hommes, femmes, politiques, militants, témoins de combats et de drames, de ces révolutions aussi. Grands témoins du monde « comme il va », d’événements qui se sont produits entre 2005 et 2023, ces personnes entrées dans l’histoire racontent ce qu’ils ont vu du monde, ce qu’ils en ont compris et l’héritage qu’ils veulent laisser aux générations futures. Un ouvrage humaniste qui ne laisse pas indifférent, loin de toute abdication et renoncement.

 

Couverture du livre "Contre l'empêchement" de Nicolas Castodi, présentant une illustration abstraite d'obstacles et de chemins.

Quand je pense à la liberté, le mot « empêchement » survient.

Comment penser la liberté individuelle au sein d’une société qui met en avant le « collectif » comme cheval de bataille de la réalisation ? C’est une des questions abordées par Nicolas Castodi dans son ouvrage Contre l’empêchement (CNRS Éditions, coll. Débats). En opposant l’individuel et le collectif, notre société « s’empêche » de penser la voie médiane qui est l’un et l’autre plutôt que l’un ou l’autre. Pourquoi choisir entre les deux si on peut tout prendre ? Une société qui « s’empêche » est celle qui ne crée pas les conditions d’un « ensemble autrement » qui combinerait théorie et pratique, réflexions et actions. Connaître les causes de cet « empêchement », c’est s’en libérer ! Encore faut-il qu’au-delà de la nécessité, il y ait une véritable volonté politique.

 

Couverture d'un livre en vert avec un enfant allant à l'école

Quand je pense liberté, je pense « émancipation ».

Quel endroit plus évocateur de l’émancipation que l’école pour penser la liberté ? Philippe Meirieu répond à cette question au travers de celles d’Émile, collégien en classe de 4ème. Dans C’est quoi apprendre ? (Ed. de l’Aube), le spécialiste en sciences de l’éducation parle de pédagogie, de transmission des savoirs, de liberté, de réalisation de soi, d’exploration des savoirs et de découvertes des horizons. Un vaste programme empreint de beaucoup de pédagogie, illustré par Pascal Lemaitre qui, comme le dit Émile à la fin de l’ouvrage, « ouvre l’esprit ». Entre pertinence et curiosité, Émile ne se doute peut-être pas que ce sont les bonnes questions qui font les bonnes réponses. En cela, il aura rempli pleinement son rôle dans ces échanges passionnants !

 

Couverture du livre collectif "Pourquoi a-t-on besoin de donner un sens à sa vie ?", montrant un labyrinthe stylisé avec une silhouette humaine au centre.

Quand je pense à la liberté, je ne peux éluder la question du “Sens”.

À la fois direction, signification et sensation, ce terme semble être une injonction immédiate à laquelle on doit trouver une réponse sous peine d’avoir la sensation d’être passé à côté de sa vie. En tentant de répondre à la question Pourquoi a-t-on besoin de donner un sens à sa vie ? (Ed. de L’Aube) des spécialistes des sciences humaines apportent quelques réponses. Entre volonté de questionnement de tout un chacun, directions proposées, champs d’investigations et réflexions, les écrivains, philosophes, anthropologues et psychiatres livrent un regard moderne à ce sujet, clés de compréhension vers le monde de l’intime. Loin d’être une ligne droite, le Sens de nos vies peut varier, se modifier, prendre de multiples directions et significations tout au long du chemin que nous parcourons, être en harmonie avec soi-même semble être la perspective. Seul bémol à cet ouvrage collectif : l’absence remarquée de femmes dans la liste des auteurs…

 

Couverture du livre "Un espoir pour le XXIème siècle" de Philippe Lemoine, présentant le slogan "Femme, Vie, Liberté" en caractères stylisés.

Quand je pense le mot « liberté », je pense « Jin, Jiyan, Azadi ! »

Comment ne pas avoir en tête le slogan du mouvement social iranien « Femme, Vie, Liberté ! » ? Ce « Jin, Jiyan, Azadi ! » dans le texte, se propageait en 2022 comme une traînée de poudre drainant des manifestations de soutien contre les oppressions. Relaté dans un essai de Philippe Lemoine, le slogan scandé comme un cri semble être de prime abord « Un espoir pour le XXIème siècle » (Ed. de l’Aube), pour que les choses changent, bougent, se transforment et se transcendent. Que reste-t-il de ce mouvement en 2024 ? Les guerres actuelles l’ont-ils fait taire ? Est-ce une utopie que de croire que les femmes, un jour, dans un futur proche, partout dans le monde, prendront le chemin de l’émancipation ? Liberté d’accès au savoir, liberté de disposer de son corps, liberté d’agir comme bon leur semble, liberté d’être tout simplement, voilà les grands défis du XXIème siècle. Ce qui se passe en Iran, se passe ailleurs et se profile au cœur même de nos sociétés : une limitation larvée de la liberté des femmes. En racontant l’histoire de ce mouvement et de l’Iran, Philippe Lemoine nous invite à nous attacher à cette « trilogie ultra-contemporaine » pour en faire la condition ultime de l’intérêt de toutes et tous. De l’humanisme à l’état brut.

 

Couverture du livre "La perversion narcissique, étude sociologique" de Marc Joly, montrant un miroir brisé reflétant une silhouette humaine déformée.

Quand penser la liberté engage la notion d’égalité…

Je suis tentée de croire que le monde tourne rond, mais quand celle-ci semble être le point de départ d’une montée en flèche de cas de « perversion narcissique », l’étonnement surgit. La sociologie peut être une piste pour comprendre la résurgence de ce qui était par le passé, présent mais rare. Dans La perversion narcissique, étude sociologique (CNRS Éditions), Marc Joly montre à quel point il est crucial d’inclure à toute observation d’un tel phénomène : une recherche historique, des études de cas concrets et une cartographie ethnologique et ce, afin de montrer l’émergence de cette appellation désormais galvaudée. Véritable ouvrage fleuve et passionnant, l’auteur met en perspective les questions philosophiques et épistémologiques liées aux questions et notions de pouvoir dans le couple, d’objectivation de l’autre, de chosification, de violences. L’égalité engendre de fait un questionnement sur la liberté de soi et de l’autre dans une dynamique de respect, si tant est que les interrogations se dirigent également vers une histoire sociale, culturelle et cultuelle dont chacun doit avoir conscience. Octroyer des droits et une liberté à autrui n’entame pas les nôtres, mais les forces masculinistes ont du mal à penser cela, ou à penser tout court. Un ouvrage essentiel qui va bien au-delà de son titre.

 

Cette Pause Lectures serait incomplète si je ne citais pas également Lignes de fuite, pour un autre monde possible de Félix Guattari (Éd. de L’aube), qui évoque les libertés dont on veut qu’elles deviennent mouvements et forces ; La voix des fantômes, quand débordent les morts de Gregory Delaplace (Ed. du Seuil), qui propose de se libérer du passé pour ne pas vivre dans mais avec lui ; Fatie Toko pour son ouvrage Et si la tech pouvait sauver le monde ? (Ed. de L’Aube) qui suggère que la technologie aurait pour but de sauver l’humanité malgré elle dans une éthique éclairée, et enfin Le cerveau reptilien de Sébastien Lemerle (CNRS Éditions) qui interroge les théories scientifiques déterministes et anthropologiques mal comprises ou infondées. Le moins que je puisse dire, c’est que la liberté et ses défenseurs ont de quoi faire ! Ici, pour l’instant, il y a de quoi lire !

 

Une chronique par Sophie Sendra Toutes ses publications

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